Talents d'élèves

Eve BIEHLER : la montre Altaïr

Posté le 08/09/2025


 

Je vous présente aujourd’hui ma montre Altair, qui m’a permis d’avoir la chance de remporter le premier prix national du concours de l’Institut des savoir-faire français.


Fruit de nombreuses heures de travail, elle est venue couronner mes trois années de formation à l’école de Morteau, que j’ai suivie juste avant d’intégrer l’ENSMM.

Le point de départ

Pour valider mon diplôme, je devais imaginer un objet horloger et en réaliser le prototype. Tout a commencé avec le cahier des charges, imposé par le parrain de la promotion : la maison française Michel Herbelin.
Je devais proposer un affichage original des heures et des minutes, tout en augmentant la réserve de marche du mouvement SW200 de la manufacture suisse Sellita.

Le déroulement

J’ai choisi de m’attaquer d’abord à la partie mouvement. Mon objectif : augmenter la réserve de marche en modifiant le moins possible la platine (c’est-à-dire sans devoir la réusiner, mais plutôt en ajoutant des modules additionnels).
Après analyse, j’ai décidé de réduire la fréquence du balancier : plus elle est basse, moins le mouvement consomme d’énergie. Pour cela, j’ai récupéré d’anciens spiraux, effectué un comptage afin d’obtenir la bonne longueur active, puis je l’ai virolé sur l’axe comportant la serge. J’ai ainsi obtenu un nouveau balancier.
Cette modification ayant changé la fréquence d’affichage, j’ai ajouté un train de rouages pour rétablir un affichage correct des heures et des minutes (ce qui reste préférable sur une montre !).

Je voulais également apporter une touche d’originalité à la lecture de l’heure. J’ai donc choisi un affichage dit « vagabond » : pas d’aiguilles classiques, mais des cadrans mobiles qui indiquent les heures en se déplaçant en continu.

Après les calculs nécessaires, je suis passée à la CAO afin de disposer de plans précis pour usiner mes pièces dans le parc machines de l’école.
J’ai fabriqué moi-même toutes les pièces visibles sur la montre (sauf le verre et le bracelet), y compris la carrure. Pour cela, j’ai utilisé un tour Schaublin, une fraiseuse, une pointeuse, une commande numérique, un laser et une machine d’électroérosion à fil.
Une fois les pièces terminées, après plusieurs semaines d’usinage, est venu le moment crucial de l’assemblage : l’ensemble devait fonctionner au minimum 60 heures sans interruption. Cette étape validée, j’ai pu passer à la décoration des composants, réalisée dans les règles de l’art : anglage poli main, cerclage, polissage, microbillage…

Enfin, j’ai pu finir par  l’emboîtage : placer le mouvement et son module additionnel dans la carrure.

Comment lire l’heure ?

La montre est organisée de la façon suivante : en haut, un arc gradué de 0 à 60 sur 120 degrés indique les minutes. Trois cadrans mobiles en forme d’étoiles affichent les heures. Tour à tour, l’un d’eux s’aligne avec la graduation des minutes. Par exemple, si le cadran des heures « dix » s’aligne avec la graduation « trente », il est dix heures trente.

 

Les caractéristiques en bref

Comme indiqué plus haut, la montre est équipée d’un mouvement automatique Sellita SW200, dont la réserve de marche a été portée à 60 heures. Elle comporte 17 rubis et un verre bombé, récupéré sur une ancienne montre à gousset et rénové.
La couleur verte provient d’un traitement ALD (Atomic Layer Deposition) vert sapin. Réalisé en partenariat avec l’entreprise Positiv Coating, ce procédé dépose de fines couches atomiques et permet d’obtenir des nuances de couleur uniques : la teinte varie du vert au bleu selon l’inclinaison. Le jeu de lumière est particulièrement intéressant avec ce type de finition.

 


Les cadrans dorés sont plaqués or 3N. La carrure est en acier inoxydable 316L. Les cadrans sont polis main, les pièces sont anglés et polies main, la bague des minutes est cerclée et polie main, et les ponts sont décorés par microbillage fin.


Grâce à ce projet, j'ai pu vivre toutes les étapes de création : conception, mécanique, usinage, finitions, esthétique.

Cette expérience m’a permise de réaliser les différentes étapes majeures de l’élaboration d’une montre et de découvrir, finalement, que c’est la partie conception qui m’intéresse le plus. Pour être pleinement efficace, j’ai besoin de construire une rigueur scientifique et d’explorer plus en profondeur le domaine des microtechniques, afin de gagner en expérience et en richesse sur le plan des principes techniques choisis. C’est ce qui m’a conduite à rejoindre l’ENSMM en alternance, ce qui me permet d’allier la théorie et l’application concrète en entreprise. Et, qui sait, un jour, je fonderai ma propre entreprise…

photo cérémonie : © Sabrina BUDON

 

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